La guerre économique est à l’économie ce que la science de la guerre est à la politique, un affrontement pour capter les ressources. Dès la préhistoire, les hommes s’affrontent pour conquérir les meilleurs territoires de chasse et de cueillette, tandis que Phéniciens, Égyptiens, Romains et Chinois de l’Antiquité sécurisent leurs routes commerciales pour éliminer la concurrence. Au Moyen Âge, les marchands allemands regroupés au sein de la Hanse mènent des guerres, déclenchent des blocus économiques, le tout au nom de la défense de leurs intérêts commerciaux. Avec les grandes découvertes, les États européens prennent les rênes et se livrent de terribles batailles pour s’emparer des épices des nouveaux mondes. Lors du premier conflit mondial, détruire le potentiel commercial de l’adversaire est un des buts de guerre affichés, tandis qu’aujourd’hui les multinationales affrontent l’hyper concurrence avec leurs propres armes, lesquelles n’ont souvent rien à envier à celles des services de renseignements et de sécurité des États. On comprend, à la lecture de cette synthèse, pourquoi le mythe libéral du « doux commerce » a toujours nié cette évidence : la politique n’a pas le monopole de la violence. Elle le partage avec l’économie.
Chercheur à l’École de pensée sur la guerre économique (EPGE), docteur en science politique, Ali Laïdi est l’auteur de nombreux ouvrages de référence dans ce domaine. Il anime également une chronique à France 24 sur l’intelligence économique.